Le numérique contre le roulis et le tangage

Focus: Technique

Le numérique contre le roulis et le tangage

5 mars 2020 metiersauto.ch – Les véhicules sont de plus en plus lourds et puissants. La circulation s’intensifie, tout comme l’assistance électronique à bord. En dépit d’un trafic en hausse, le nombre d’accidents ne cesse de diminuer. Qu’apportent les systèmes de dynamique de conduite et d’assistance, quelles sont les limites physiques définies et qu’apportera l’avenir ?


Les systèmes de régulation du châssis exigent un travail de développement très approfondi. Sur la photo : le prototype de la Pagani Huayra BC dans des conditions µ-split (coefficients de frottement différents à gauche et à droite), qui imposent des exigences élevées aux systèmes de régulation du châssis lors du freinage et de l’accélération. (Photo : Bosch)

se. « Les bons conducteurs attrapent des mouches sur les vitres latérales », a un jour plaisanté Walter Röhrl, légende du rallye et passionné de voitures de sport. Autrement dit, une conduite transversale dans les virages entraîne l’accumulation de toutes sortes d’insectes morts sur les vitres latérales et non avant. Les actuelles lois sur la circulation routière et la densité du trafic ne permettent plus ce style de conduite. Outre le fait que la largeur des routes est identique depuis des décennies, les véhicules sont de plus en plus volumineux de sorte qu’il n’est plus possible de dériver dans les virages.

Les exigences de confort et de sécurité entraînent aussi une augmentation de la masse des véhicules. Les voitures hybrides, hybrides rechargeables et VEB sont nettement plus lourdes que les modèles à combustion. Les clients attendent donc des puissances d’entraînement supérieures générant une expérience de conduite identique lors des accélérations ou de meilleures valeurs d’élasticité. Les SUV, dont la masse et le centre de gravité sont élevés, sont actuellement les véhicules les plus populaires. Des premières mondiales et européennes sont régulièrement célébrées au Geneva International Motor Show (GIMS). En conclusion, tous les ingrédients qui contribuent au plaisir de conduite sont physiquement freinés par le concept du véhicule. C’est là que l’électronique entre en jeu.


Grâce aux interventions de freinage et à la régulation motrice, les véhicules maintiennent leur trajectoire même à la limite physique. Cette performance est rendue possible grâce à la puissance de calcul élevée et à la mise en réseau des systèmes. (Photo : Audi)

Il est donc d’autant plus étonnant de voir à quel point les SUV de 2 ou 3 tonnes des marques haut de gamme conservent leur équilibre dans les virages. Tandis que les voitures de petite dimension et de catégorie moyenne à la conduite sportive tendent à sous-virer avec des grincements de pneus et des freinages ESP précoces, limitant ainsi le plaisir au volant, les SUV hautement motorisés et dotés de tous les systèmes high-tech roulent à vive allure.

Plus un véhicule est lourd, plus sa force centrifuge (force latérale) est élevée dans les virages. Plus le centre de gravité est élevé, plus la carrosserie s’incline sur le côté (roulis). Les exigences en matière de dynamique latérale sont défavorables. La satisfaction des exigences sportives au niveau de la dynamique longitudinale (pour des valeurs de décélération et d’accélération adéquates) nécessite des systèmes de freinage puissants et une forte puissance d’entraînement.


La régulation des machines électriques pour l’entraînement et la distribution de la décélération à la récupération par les moteurs électriques et les freins de roue est particulièrement coûteuse sur les VEB. (Photo : Audi)

Le centre de gravité étant élevé, le tangage et le mouvement autour de l’axe y/transversal sont à nouveau produits lors des deux manœuvres. La charge de roue renforcée accroît donc la puissance sur la chaussée. Plus la charge de roue et le coefficient de frottement µ entre le pneu et la chaussée sont élevés, plus les forces transmissibles au pneu sont importantes.

Les composants des châssis ultramodernes résolvent parfaitement le problème : les stabilisateurs de roulis actifs (aujourd’hui avec moteurs électriques 48 volts, autrefois avec actionneurs hydrauliques), les systèmes d’amortissement des vibrations adaptatifs et la suspension pneumatique à systèmes à chambres multiples maintiennent comme par magie la carrosserie presque à l’horizontale pendant toutes les manœuvres. Les assistances à la direction électromécaniques adaptatives ou les directions à superposition sur l’essieu avant et les systèmes intelligents de direction de l’essieu arrière donnent au conducteur la sensation d’être un pilote de course, la technique compensant, dans les limites physiques, les failles en matière de capacité de conduite et les contraintes physiques. Grâce aux nombreux capteurs de dynamique de conduite, une puissance de calcul incroyable, une transmission de données ultrarapide et surtout une excellente performance en matière de développement et de coordination, la conduite sportive devient une évidence, y compris sur les SUV lourds.

Même les manœuvres d’évitement ne sont plus redoutées. Les actuels véhicules de pointe réussissent aujourd’hui avec brio le test de l’élan. Et si la carrosserie tend à se renverser sous l’effet d’un centre de gravité élevé, un freinage ciblé et puissant sur la roue avant via le groupe hydraulique ESP produit des merveilles : le pneu passe du frottement statique au frottement dynamique et ne soutient plus la carrosserie, prévenant ainsi tout risque de tonneau.


Les interventions de l’EPS sont passives et transforment uniquement l’énergie cinétique en chaleur. La vectorisation active du couple, soit la répartition de la force motrice sur chaque roue, renforce nettement le plaisir de conduite et la sécurité. (Photo : Audi)

Dans un autre contexte, la neige est un vrai casse-tête pour les développeurs. Les actuels systèmes de contrôle du châssis devraient offrir une sécurité maximale lors de toutes les manœuvres, permettre une maîtrise constante du véhicule dans toutes les conditions d’adhérence, et garantir un maniement aisé en dépit d’une masse et d’un centre de gravité élevés. Les manœuvres de freinage dans des conditions µ-split, le freinage en courbe en cas de coefficient de frottement défavorable et les manœuvres d’évitement dans des conditions d’adhérence changeantes restent très difficiles à maîtriser. Le passage de l’asphalte sec à humide ou à une route enneigée ou gelée est délicat. Pourquoi ? Parce qu’entre le pneu et la chaussée, aucun capteur n’indique comment les forces sont transmises sur la route via la surface d’appui de la taille d’une carte postale.

Si un appareil de commande souhaite qu’un véhicule moderne se déplace dans les limites physiques (cercle des forces), il a besoin des signaux de capteurs d’angle de braquage, de vitesse des roues, d’accélération et de vitesse de lacet. Dans l’appareil de commande de la dynamique du véhicule, le système calcule le couple d’entraînement maximal autorisé (régulation du patinage), le glissement maximal possible pendant le freinage (ABS) et veille – atout majeur de la dynamique de freinage – au maintien du véhicule sur la voie souhaitée (EPS) grâce au freinage si les conditions deviennent instables.

Les progrès des fabricants et fournisseurs automobiles dans la dynamique de freinage ne peuvent être qu’entrevus, à savoir expérimentés. Des outils de développement sans cesse optimisés, des simulations de conduite et une collaboration entre les services d’ingénierie renforcent la sécurité. Du point de vue physique, les systèmes sont toujours plus à même de calculer en amont les forces transmissibles aux quatre roues et de doser les forces longitudinales et transversales en conséquence. La liaison avec la carte numérique du système de navigation permet au véhicule d’anticiper la largeur du prochain virage et de déterminer la vitesse en courbe. Sur les systèmes ACC ultramodernes, le logiciel réduit la vitesse pour aborder le virage en toute sécurité. Les systèmes calculent bien entendu toujours une réserve, car ils ne peuvent pas encore prévoir les variations de valeurs de frottement dues aux feuilles à l’automne, aux flaques après la pluie, la neige ou la glace. Le système détecte également la pluie grâce au capteur situé sous le pare-brise, mais ne renseigne pas précisément sur le niveau de pluie sur la chaussée. Porsche prévoit d’améliorer cette information en intégrant des micros dans les passages de roue avant de la nouvelle 911 (voir encadré).

Si un véhicule est menacé d’instabilité lors d’une manœuvre, la régulation de la dynamique de conduite doit toujours réagir et ne peut pas agir. Elle entre en jeu lorsque la vitesse périphérique des roues ne correspond plus à celle du véhicule (patinage). Pour l’exploiter au maximum, il serait plus intéressant de connaître à l’avance l’évolution du coefficient de frottement et la réserve de puissance encore disponible sur les pneus. Les OEM et les fournisseurs y travaillent.

Les constructeurs automobiles disposent de plusieurs options pour répondre aux désirs ludiques de la clientèle aisée : sur le circuit, la voiture de sport évolue en virage à un angle de dérive défini, bien que la pédale d’accélérateur soit enfoncée. L’attribution des forces motrices à l’aide d’entraînements d’essieux superposés ou d’embrayages multidisques à commande électronique permet d’adapter les forces motrices sur un essieu en fonction de la situation. Une puissance plus élevée est appliquée sur la route au niveau de la roue motrice extérieure au virage : la voiture roule comme sur des rails.

Ces conditions sont idéales pour que les VEB hautement motorisés ou les voitures de sport à propulsion hybride augmentent leur vitesse en courbe. Et le plaisir de la conduite dans tout ça ? Walter Röhrl et d’autres pilotes ambitieux en sont convaincus : seuls un « popomètre » calibré et de bons réflexes garantissent le plaisir de conduite et des temps de tour rapides sur le circuit, même sans systèmes de dynamique de conduite. Mais l’électronique offre et continuera à offrir une assistance non négligeable. Les VEB lourds et les hybrides sportifs peuvent ainsi également faire le bonheur des automobilistes à la conduite sportive. Même Walter Röhrl, fervent critique des VEB, s’est montré enthousiaste lors des séances d’essai de la Porsche Taycan. Cet expert n’aurait pas imaginé que la Taycan pourrait déplacer une telle masse de manière aussi dynamique ; une performance rendue possible par la technologie numérique.

 
Quand la voiture entend la pluie : Wet-Mode sur l’actuelle Porsche 911

se. Deux micros piézoélectriques logés dans les passages de roue avant constituent la pièce maîtresse externe du nouveau système de châssis de Porsche. Avant que la 992 ne perde en stabilité sous l’effet de la baisse rapide du coefficient de frottement sur chaussée humide, l’appareil de commande de la dynamique de conduite détecte la présence d’eau sur la route grâce aux projections dans le passage de roue. Une forte quantité d’eau sur la chaussée accroît le bruit dans le passage de roue et modifie les fréquences sonores. L’appareil de commande conditionne le système de stabilité ESP (sur la Porsche PTM) et le régulateur d’antipatinage ASR (PTM). Dans un deuxième temps, il avertit le conducteur que la limite d’adhérence est plus faible et lui conseille d’activer le « Wet-Mode » via une touche. En cas d’activation, l’ESP, l’ASR, mais aussi l’aérodynamique sont ajustés via un réglage du spoiler arrière pour accroître la pression de contact sur l’essieu arrière et la répartition de la puissance motrice, notamment sur les 911 à transmission intégrale. La régulation active de la puissance motrice permet au véhicule de conserver sa stabilité et prévient une transformation de l’énergie cinétique (mouvement) en énergie thermique sur les freins de route sous l’effet du freinage. Des vitesses en courbe supérieures peuvent ainsi être atteintes même en cas de neige ou de pluie.
 

 

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